vendredi 6 février 2009

Nénette S'essaie Au Conte.

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La petite tisseuse aux yeux mauves
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__Elle avait son étal dans la rue principale, elle y vendait ses étoffes et pour trois sous, proposait d’ajuster une boutonnière ou de refaire un ourlet. Elle n’était pas la meilleure tisseuse de la ville, mais le parfum du savon avec lequel elle lavait le linge, et les brins de lavande qu’elle glissait sous le tissus lorsqu’elle le faisait sécher suffisaient à ravir les clients. Elle n’était pas non plus celle sur qui les garçons du quartier se retournaient, mais ses yeux étaient mauves jusque sous la rétine, et elle se plaisait à penser que l’iris qui y occupait le centre portait la même couleur que la fleur qui elle, en portait le nom. Son teint était trop pâle et ses cheveux trop blonds, et depuis qu’elle avait atteint huit ans elle parlait peu, et seulement en vers. Des vers maladroits, qui portaient la marque de son absence sur les bancs de l’école, mais de la poésie tout de même, tout en justesse et en musicalité. La petite tisseuse aux yeux mauves n’était donc certes pas qu’une simple petite tisseuse aux yeux mauves, bien qu’elle n’en parût pas davantage.
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La première fois que le fils du confiseur rencontra la petite tisseuse, il portait sous son bras un panier de linge à repriser, et aux pieds des bottes dont la couleur du cuir rappelait les caramels que faisait cuire son père. Seul le hasard voulu que ce jour là il croisa son regard, car elle n’avait pas pour habitude de fixer les clients dans les yeux, tant elle redoutait les quolibets à propos de la couleur des siens. Il croisa donc son regard, et l’on raconte qu’il s’y serait noyé si la chose avait été possible. Une fraction de seconde plus tard la petite tisseuse aux yeux mauves baissait de nouveau la tête, mais la poésie qu’il trouva en contrepartie dans sa voix acheva de le rendre fou amoureux.
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__Il revint tous les jours, avec de nouvelles étoffes à réparer, et la petite tisseuse aux yeux mauves qui se gardait soigneusement de relever la tête ne pouvait donc le reconnaître. Elle se contentait de noter ses commandes, se réjouissant seulement de voir son commerce devenir à ce point florissant. Les jours passèrent, puis les mois, le fils du confiseur déchirait en secret les jupons de sa mère pour que celle dont il était épris les raccommode, et volait dans les économies de son père pour payer son dû. Persuadé que la petite tisseuse aux yeux mauves avait remarqué son inclination et n’était que trop timide pour dévoiler à son tour la sienne, il décida de se déclarer de la façon qu’il jugeait la plus merveilleusement romantique. C’est ainsi qu’un matin il déroba dans la penderie de son père le plus beau veston qu’il put trouver, fit un large accro dans la doublure et y glissa un mot dans lequel il dévoilait la profondeur de ses sentiments. Le plan était habile, mais la petite tisseuse aux yeux mauves n’y vit qu’une lettre que le client avait négligé de retirer, et par discrétion elle la laissa à l’endroit où elle l’avait trouvé en n’en lu pas une bribe.
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__Anéanti par l’indifférence qu’elle témoigna lorsqu’elle lui remit son habit, le fils du confiseur s’enferma dans le chagrin. Sa peine fut doublée lorsque ses parents, ayant découvert ses larcins, le punirent de cinq années toutes entières dans le pensionnat le plus lointain qu’ils purent trouver. C’est ainsi que le fils du confiseur décida de prendre la fuite, et personne ne le revit plus jamais. On raconte que c’était en février, et qu’il se perdit dans la neige.
On raconte qu’il s’appelait Valentin.

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________Oui oui je sais xD


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3 commentaires - ajouter un commentaire:

Anonyme a dit…

Mon coeur se remplit d'allégresse à la lecture de ce conte dis donc !

Anonyme a dit…

T'es bien plus douée que la pseudo future L potentielle que j'aimerais être =)

Anonyme a dit…

Que diable, quelle plume ! (archi-nul, désolée)