mardi 22 décembre 2009
Nénette & Les Partiels... Encore...


vendredi 4 décembre 2009
Nénette & Les Contes d'Effet.

___Elle avait les yeux bleus et s’appelait tristement Cannabis. Son père n’avait pour ainsi dire jamais existé, et sa mère la haïssait depuis qu’elle l’avait su grandir sous ses côtes. Elle l’appela Cannabis dans un élan de haine mêlé de frustration. Frustration de ne pas avoir su garder son homme. Haine envers cette môme qui lui rappelait son échec. Lorsqu’elle l’expulsa hors de son ventre, elle refusa de crier. Elle se contenta de fixer la gamine qui braillait, en se jurant qu’elle ne trouverait pas le repos tant que ce bout de chair humaine à la voix de crécelle n’aurait pas vécu l’enfer. Elle s’y appliqua avec tant de hargne et de détermination que son plan fonctionna. Elle retrouva le sourire en maltraitant sa fille, en l’élevant dans la crasse, la nourrissant de vide. Il n’y eu pas d’histoire avant d’éteindre la lumière, pas de petites robes en tartan, pas de tartines au beurre. Elle l’habillait en garçon, lui coupait les cheveux de travers, la privait d’école, d’instruction, d’affection. Et s’en délectait. Jamais elle ne lui adressa un autre mot que ce prénom, Cannabis. Il tombait comme un couperet derrière la nuque de l’enfant, et se muait, jour après jours, en agression à huit lettres. Les années se succédèrent, et la mère perdit son âme en même temps qu’elle perdit la raison. Le matin de ses dix-huit ans, Cannabis s’éveilla sans sourire, elle fourra deux livres dont elle ne savait même pas lire le titre dans une taie d’oreiller travestie en sac, et passa pour la dernière fois le pas de sa porte. La rumeur dit que la mère rendit son dernier souffle ce jour-là.
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___Il avait la barbe taillée en V et le regard perçant. Des années qu’il habitait cette terre, des années qu’il dessinait des poèmes dans sa tête sans pouvoir les transcrire. Le vieil homme était dyslexique, et sur le papier sa poésie avait un air de composition bâclée par un mauvais élève. Lorsque, dans de rares tentatives, il essayait de tracer ce qui sonnait si juste en lui, c’était pour finalement voir des lettres s’entremêler, des boucles s’enrouler, s’aplatir, des mots se travestir. Cependant, si le vieux poète n’avait pas l’orthographe facile, sa mémoire était des plus vaillantes. En quatre-vingt cinq années d’existence il apprit par cœur et se répéta tous les jours pas moins de cinq-cent-quarante-sept poèmes, des sonnets, des quatrains, des milliers de rimes qui s’épousaient à la perfection, de mots qui brillaient comme des bijoux. Mais quatre-vingt-cinq années sont bien le poids de toute une existence, et un matin, à son réveil, il fut incapable de réciter la dernière rime de son cinquante-quatrième tercet. Ce matin là fut le matin où le sens qu’il avait donné à sa douce vie de poète se tordit pour se resserrer autour de son coup. La vieil homme se sentit suffoquer, et passa précipitamment le pas de sa porte en priant pour qu’un supplément d’air dans ses poumons lui rende sa rime, et sa sérénité. La rumeur dit qu’une mère rendit son dernier souffle ce jour là.
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___C’est ainsi qu’ils se rencontrèrent, dans un instant de détresse dévorante, avec au ventre la peur grandissante de finir seuls, et inutiles. Cannabis croisa le regard perçant du vieux poète, le vieux poète dévisagea Cannabis. Il lut son âme à travers ses deux prunelles bleues, il ressentit son envie de naître à nouveau, de recommencer quelque chose de plus beau. Il la prit sous son aile, et elle aima ce nouveau père loufoque à la barbe en bataille. En une année il lui apprit à lire, en six mois elle parvint à écrire sans trop de fautes. Lentement, ils transcrivirent ensemble les cinq-cent-quarante-sept poèmes, et sur le papier, tracée de cette petite écriture infantile et tremblante, la poésie du vieil homme s’en trouva plus belle, plus précieuse. Ce fut Cannabis qui remplaça la rime manquante du cinquante-quatrième tercet. Ses mots étaient justes et lumineux, et son art se mêla rapidement à celui de son maître. De ces deux âmes d’artistes, on n’aurait su dire laquelle était la plus vieille. Elles fonctionnèrent ensemble, jusqu’à l’issu logique de toute vie. Nul ne sait qui des deux partit le premier. Sont-ils d’ailleurs vraiment partis? Ils vivent encore, sous une rime, derrière un alexandrin. Dans chaque poème, ils vous sourient. Cannabis, et le vieil homme dyslexique.


lundi 30 novembre 2009
Nénette Cherche.
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samedi 21 novembre 2009
Nénette Sous La Douche!
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___Je suis un pommeau de douche. Quinze pourcents d’aluminium, quatre-vingt-cinq pourcents d’acier inoxydable. Quelqu’un, un jour, a percé ma tête de trous par lesquels je crache dorénavant sur demande des litres d’eau potable qui se perdent à travers un siphon. Je ne suis pas artificiellement intelligent, je ne suis même pas robotisé, j’obéis juste à des bras, des jambes, des corps humains qui m’utilisent et m’ont greffé sur le mur de leur douche. Mon existence est monotone. Je compte les heures en micromètres carrés que la corrosion vient grignoter sur mon crâne, les jours en clignotement des néons de la salle d’eau, les années en rides qui creusent irrévocablement les peaux de mes propriétaires. De mes tortionnaires devrais-je dire. Deux enfants, deux parents. Et cinq années que je suis bétonné, comme menotté, à ce mur d’un blanc sale, et que dans l’espace limité par trois cloisons humides et un ridicule rideau de douche griffée Ikea, j’asperge consciencieusement leurs visages, aplatis leurs cheveux contre leurs nuques, fais couler leur rimmel, piquer leurs yeux. Cinq années au fil desquelles j’ai vu la petite fille se muer en adolescente au physique ingrat, le crâne du père se transformer en terre hostile, le ventre de la mère enfler, se déformer, et trois saisons plus tard laisser place à un amalgame de peaux plissées et de cicatrices, au fil desquelles j’ai entendu des pleurs, des grincements de dents, des voix de crécelles qui faisaient trembler les murs, au fil desquelles j’ai surpris des situations indécentes, des enchevêtrement écœurants de bras et de jambes, de ces visages trop bien connus, ou parfois d’autres, anonymes.
J’ai cinq ans et je ne supporte plus de fixer ces corps blancs, bourrelés, hideux, criant de défauts. Ces quatre parcelles de peau laiteuses, sur lesquelles on me presse, sur lesquelles je crache mon dégoût, ces enveloppes nues que je noie sous mes jets pour les brouiller à ma vue, que je brûle d’une eau trop chaude, que j’abîme de toutes mes forces.
Car n’avez-vous jamais remarqué à quel point il est difficile de me régler ? Et croyez-vous vraiment que ce soit un hasard ?
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jeudi 19 novembre 2009
Nénette Se Vampirise.
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dimanche 15 novembre 2009
Nénette Voudrait Bien Deux Sucres S'il Vous Plaît.
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samedi 14 novembre 2009
Nénette S'Indécise.
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mardi 10 novembre 2009
Nénette Porte Du Noir.
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jeudi 29 octobre 2009
Nénette Se Mononucléose.


mardi 27 octobre 2009
Nénette Raconte Des Histoires.


vendredi 16 octobre 2009
Nénette Poupée De Chiffon.
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mardi 22 septembre 2009
Nénette Enfiiiiin!
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_ Il est midi-soixante-deux sur le cadran digital de la grande tour d’aluminium. Au pied de l’édifice, sous le poids écrasant de sa hauteur, se tient la môme, le cœur épinglé sur ses rêves, palpitant d’espoir. Elle contemple le chaos qui s’élargit devant ses cils, en sorte de nuée lacrymale, qui serait à la fois la cause du drame, et son effet. L’effet du temps. L’effet de cette broutille délaissée qu’a été le destin. Il pleut sur la ville à cet instant, il pleut sur la planète, et les nuages qu’on essore ont des formes de chamallow. Il est midi-soixante-deux, l’heure inattendue, l’heure déguisée en guillotine. La pluie ne cessera que lorsqu’elle aura enseveli les hommes, lorsqu’elle aura lavé le monde, l’aura déshabillé de ses mauvaises herbes. Alors la môme s’enracine sous la grande tour d’aluminium, elle se voit dans ses vitres noires, et l’éclat sombre du verre se retrouve dans ses yeux, en une mise en abime sinistre. Les femmes crient, les bébés pleurent, les visages se déforment à en faire peur, les gouttes de pluie se changent en flammes et dévorent les arbres. Il ne restera bientôt plus rien de la ville, hormis la tour, désormais rougeoyante, et puis la môme, protégée par ses murs. Il n’y aura plus de soir, plus de matin, il est midi-soixante-deux, l’heure de la fin. L’heure de l’apocalypse. Le temps s’est arrêté. Les immeubles se tordent, s’effondrent, mais le crissement du verre n’est rien à côté de celui des rêves qui se brisent. La môme ne frissonne pas, elle attend. Elle attend que le ciel s’écroule, fracasse son crâne, disloque son squelette. Elle attend d’être une miette, pour se sentir enfin légère. Délivrée du poids d’exister. Il est midi-soixante-deux et même la nature rend les armes, dispersé en cendres encore fumantes. Et la tour dégringole, à son tour. Alors la môme ferme les yeux.
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lundi 31 août 2009
Nénette Est Reviendue.
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vendredi 21 août 2009

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vendredi 14 août 2009
Nénette Entre Parenthèses.
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vendredi 7 août 2009
Nénette Et Ses Orteils En Eventail.

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mercredi 5 août 2009
Nénette Sur Une Plage.
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Il y a très peu de gens beaux sur la plage. Le soleil m'apparaît comme une sorte de révélateur, de pellicule photographique sur laquelle viennent se figer les preuves de la banalité humaine. Je ne vois pas de corps, je vois les jambes trop courtes, les peaux plissées, les cheveux emmêlés se frayer un passage dans l'eau en éventrant leur reflet, et le sillon qu'ils tracent à la surface laisse comme une marque de défaite, dans ce combat implicite entre les hommes et la mer dont-ils ont investi les bords, en masse. Entre les hommes et Mère Nature. Mais peut-on vraiment parler de combat, quand l'un des deux contestants fait office de poussière?
Il y a des notes de musique contre mes tympans, derrière les instruments surnage le bruit des vagues et ce silence retentissant qu'est le son de la tranquillité. Et une odeur de vacances s'insinue entre les grains de sable.
Il y a très peu de gens beaux sur la plage.
Pourtant aujourd'hui est une belle journée.
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lundi 3 août 2009
Nénette Est Une Artiste.


mercredi 29 juillet 2009
Nénette En Plein Soleil.



vendredi 24 juillet 2009
samedi 18 juillet 2009
Nénette à l'Anis.
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PS: un nouvel horaire de blog:


vendredi 10 juillet 2009
Nénette Au Boulot.
Le nouveau stagiaire: Tu fais quoi?
Nénette: Je suis sur Facebook et je bois un diabolo grenadine et toi?
Le nouveau stagiaire: Je fais une pause là.
Nénette: Ah ben viens on va voler des chocolatines en bas, j'ai trouvé la planque! En plus ça tombe bien j'ai fini ma grenadine, je vais me faire un tit jus d'abricot!
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Je kiffe mon boulot. Héhé.
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samedi 4 juillet 2009
Nénette Dans La Brume.
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De la brume. De la brume à perte de vue. Sous leurs pieds, autour de leur torse, entre leurs yeux. Voilà dix ans qu’elle a tout recouvert, des vieux sentiers perdus sillonnant la forêt, aux grands hôtels tout de blanc crépis qui bordent consciencieusement la grand- place. Dix ans que la ville est tombée dans l’oubli, et que ses habitants s’immergent lentement dans une existence léthargique. Que s’est-il passé ? Que leur a-t-il manqué ?
Dans un monde désormais lacunaire, la quête de l’origine du désastre a des allures de dédale mythologique. Et la brume vient masquer les derniers pans de vie, colmater les interstices de vérité, pointiller leurs contour. Le froid qui règne entre les murs est polaire, et s’étire comme un air glacé, auquel se mêlent les soupirs désabusés, doucement résignés. Le froid a gelé l’envie, il a étouffé la révolte, étoffé la lassitude.
Pourtant, dans cette ville glaçon, il y a encore une âme qui survive. Une cape qui tournoie autour d’un buste squelettique, une silhouette sans visage, juste un fantôme brûlant, une fin de flamme qui se contorsionne derrière deux lobes injectés de sang, figurant un regard sans histoire. L’écarquilleur. Ainsi l’appelle les habitants encore capable d’inventer un nom. Car lorsqu’on les retrouve, ses victimes ont les yeux révulsés et les paupières béantes. Voilà dix ans qu’il n’est plus vraiment un homme, mais un spectre de colère, une ombre menaçante qui étend ses ailes sur la ville mourante. La brume a volé sa mémoire, mais elle n’a rien pris à sa rage. L’écarquilleur n’est pas un meurtrier, car ceux qu’il assassine ne sont plus tout à fait des vies, mais des pantins qui respirent. Et leurs regards ternis sont l’écrin qui renferme l’explication. L’écarquilleur le sait. Il est un enquêteur légiste, un détective funèbre. L’arbitre du combat singulier entre les hommes et leur propre fin.
L’écarquilleur veut des réponses. Il n’y en a qu’une, et elle est dans la brume, il l’a compris. Cette brume qui s’étend à perte de vue, cette punition qui vient du ciel. Les hommes auraient-ils des raisons de payer ? Qu’y a-t-il dans leur chair, derrière leur pupille vide, dans ce labyrinthe d’excuses qu’on appelle cerveau ? L’écarquilleur cherche, arrache, évide, le sang coule, tandis que les hommes continuent d’expirer leur bêtise, en volutes blanchâtres.
Et la rumeur dit que la brume a gagné la ville voisine.


dimanche 28 juin 2009
Nénette Fait Du Barbouillage.
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Ailleurs, je n’ai pas trouvé de sens véritable. Je suis une couleur utilitaire, un ingrédient. Je rehausse mes voisines de palette, je suis l’éclat du vert émeraude, le feu de l’orange crépitant. Et entre les lignes de l’arc-en-ciel, j’ai des allures d’intrus invisible, d’erreur inopinée. Je suis une information, je suis l’encre du surligneur de l’étudiant, je suis l’enduit des lambris glacés de l’armoire à produits dangereux dans la salle de TP. Je suis l’alternative pratique, la solution en cas d’hésitation, oui, je suis la couleur des murs de la chambre du bébé lorsque les parents préfèrent avoir la surprise. Je suis un concept hybride, je picote et fais cligner des yeux mais je n’éblouis rien. Je suis gênante, agaçante, et pourtant trop claire pour être discernable. Je ne transcris rien, mon encre n'alimente aucune plume, je n’ai jamais écrit la moindre bribe, la moindre miette de mot, la lumière me rend invisible et la nuit ne me dévoile pas pour autant. Même les fleurs semblent moins jolies lorsque je me mélange à leurs pétales.
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Et lorsque dans un élan de désespoir, je cisaillerai le fil de ma demi-vie sans mémoire, je ne deviendrais même pas mon propre éclat un peu terni, mais une tâche orangée sur le sol, une flaque mal mélangée, une odeur de sang qui salit quelque chose, quelque part. Et ce sera la fin méritée d’une existence secondaire.
L’épilogue insipide de l’histoire d’une couleur primaire.
Pas de larmes, pas de mains qui se tordent, ni d’ongles qui crissent.
Juste un rire jaune, qui résonne quelque part.
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Et dire que je ne suis même pas la couleur d’un Ipod.


samedi 27 juin 2009
Nénette Fait Un Voeu Liquide. Et Souhaite Pouvoir Nous Repêcher.
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____Cent années ont coulé sur sa nuque et il se tient près du mât, comme pour anticiper l’ascension finale. Le petit mousse n’est dorénavant petit que par la taille et les stigmates sur sa peau brunie sont les plus beaux témoignages de sa survie. Il n’est plus qu’une vieille toile distendue, pourtant il est entier et dans son unique œil scintille le bleu dans lequel il s’est finalement trouvé. Le petit mousse est un petit grain de sable en équilibre, il ne parle plus mais il écoute, il ne lit plus mais il contemple, et le murmure incessant des vagues reste ce secret qu’il n’a pas osé profaner. Le ciel, la terre, la mer, la brise du vent sont ses étendards, et surtout de bien meilleurs amis que l’homme. Homme qu’il n’est plus aujourd’hui, non, il est l’odeur salée sur sa propre peau, il est le bruit sec de la voile qui claque, il est le bois du mât qui soutient son vieux corps cicatrisé, il n’est qu’un petit mousse, et son nom a des allures de bulles de savon.
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____Alors dans un dernier effort il ôte son vieux couvre-chef rapiécé, et s’agenouille sur le pont, il pèse de tout son poids sur ce sol qu’il a mille fois briqué et qui brille de ses efforts, il pèse de tout son poids vers la mer, celle qui lui a offert sa plus belle prise. Sa sérénité. Le petit mousse s’asphyxie sous le soleil. Et son dernier souffle sonne comme une poésie silencieuse.
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vendredi 26 juin 2009
Nénette Is A Moonwalker.
Sans être une fan inconditionnelle du personnage...
Le monde brille résolument moins bien ce matin.
R.I.P.
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lundi 22 juin 2009
Nénette ou Madame Liberté.

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Mon histoire est celle de milliers d’autres moi, petits êtres démantibulés, petites mouches prisonnière de l’immense toile des luttes intérieures et conflits d’intérêt. Est-on un monstre si on choisit de rejeter la moitié de son ADN, plutôt que de l’aimer ? Doit-on tuer toute marque de reconnaissance, ou bien rester redevable, malgré tout ? La question serait simple si elle n’était pas posée à une môme haute de douze années, uniquement vieille d’un temps converti en calvaire. Car en réalité l’agneau ne doit rien au loup, si ce n’est son reflet déformé gravé sur l’émail de deux canines brillantes. Si ce n’est la mise en terre sans le moindre cérémonial de cette petite chose ténue qu’est l’innocence.
Le jour où j’ai fait un pas vers le paternel que j’avais rejeté, celui-là me rayait de sa mappemonde pour de bon. Et alors ? Il m’a suffi d’hausser les épaules et d’avancer bien droite sur mes bottines, le menton toujours plus haut, sans me prendre les pieds dans le trottoir. Parce qu’à défaut de m’avoir montré comment respirer sous l’eau, mes vingt années d’existence m’ont au moins appris à marcher, et que mon monde ne se résume pas à un quadrillage de méridiens et de parallèles. Après tout, les égratignures ne sont rien lorsqu’elles forment un joli dessin, lorsqu’elles transcrivent un progrès. Et au fil des jours, on apprend à supporter les complications, à respecter la douleur, parce qu’elle sait être douce celle-là, quand elle est d’humeur satinée. Grandir sans figure masculine n’est pas impossible, l’ascension donne plus d’ampoules aux pieds, mais elle n’en est que plus jolie. Et d’avoir souffert à trop fortes doses on parvient à capter plus précisément le sens des mots bonheur, privilèges, euphories. Alors arrive ce jour où l’embryon de demi-vie qui nous symbolise se mue maladroitement en ce qui pourrait ressembler à un petit bout de femme un peu tordu. Faudrait un peu revoir les détails et les entournures, mais on dirait bien que ça prend forme, finalement. Et au creux de nos cils se dessinent des miettes d’espoir qui brillent comme des bijoux. Ce jour là on comprend qui on est, et à qui on ne veut pas ressembler, et même si tout ça à des allures de labyrinthe, on s’en contrefout, parce que notre destin est plus clair que jamais, et que nos poches sont remplis de rêves tellement dodus qu’ils risquent pas de se faire la malle par un petit accro mal recousu.
Ce jour là devient l’instant où on à bousillé la chrysalide. L’instant de l’implosion.
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Nénette S'intériorise.



dimanche 14 juin 2009
dimanche 7 juin 2009
Nénette S'en Remet Au Soleil.
Un ballon rouge, un poisson rouge. Une entaille rouge sur le bras de l'enfant. Trois fois rien. Une bêtise de cours de récréation pourrait-on supposer en se fendant d'un sourire. Pourtant l'enfant ne va pas à l'école. Et cette blessure il se l'est infligé. A peine six ans d'existence et il a déjà tout multiplié. Les voitures bleues par les voitures rouges, les grains de sel par les grains de poivre, les battements de cils par les froncements de sourcils. Six ans qu'il n'accepte plus de manger que des aliments découpés en carrés parfaits, ne boit dans un verre que s'il est plus transparent que l'eau qu'il contient, ne parle pas, refuse de porter du vert, ou encore perd violemment, et jusqu'à se blesser, le contrôle de son petit corps lorsqu'il s'agit d'aller au parc. Car l'enfant n'aime pas le parc. Il déteste cette foule désordonnée de détails qu'il assimile malgré lui, les feuilles des arbres dont il ne peut s'empêcher de retenir le dessin des nervures, les tiges de roseaux dont il estime inconsciemment l'angle qu'elle font avec la verticale, il déteste ces cercles qui s'étirent vers lui et la simple vue d'un poisson prisonnier de l'eau lui coupe la respiration. Il la déteste cette nature si mal rangée, il la haît.
Il a six ans et il se tait. Et s'il est muet, c'est de compréhension. D'assimilation de ce monde qu'il a mis en équation. Son intelligence est un fardeau qu'il porte à bout de bras, un fardeau car elle lui a tout révélé. Ecartelée entre le bien et le mal, il la voit, la vérité. Elle l'éblouit, sans même scintiller, pourtant lui la contemple sans ciller. Et dans son regard d'enfant plane l'ombre d'un vertige mal épellé. Car ce vide-là s'étend à l'infini, plus haut encore que le sommet de l'arbre centenaire qui ploie au dessus de son petit corps. Alors l'espace d'un instant il se débarrasse des lettres, des chiffres qui s'emêlent entre ses tempes, par sa pensée il les concentre au coeur du ballon rouge, puis il détache le fil de son frêle poignet. Pour une seconde il se diminue en se délivrant de sa clairvoyance.
Une seconde de quiétude.
Et le ballon rouge se perd dans un nuage, près du soleil.


jeudi 28 mai 2009
Nénette-Et-Ses-Partiels-Vous-Saluent.


mercredi 20 mai 2009
Nénette En Mode Noir Sur Noir.

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Mais mourir c’est aussi expier en expirant une dernière fois. Un peu comme si de toutes ces années de respiration, d’air brassé dans nos poumons, ne restait plus que le souvenir glacé d’un pêché un peu honteux. Alors on s’excuse silencieusement pour l’imposture, on tamponne ses yeux obstrués par la cataracte, et entre les rigoles que les rides ont creusé, une larme salée se mue en wagonnet de montagnes russes. On l’entendrait presque grincer, tant l’appareillage est ancien. Alors mourir ça n’est plus qu'expulser d’un simple affaissement de poitrine le calque translucide sur lequel on avait tout tracé, à l'époque, en se disant que ça marcherait.
Mourir c’est froisser le brouillon et jeter les négatifs, sans qu’il n’y ait jamais eu de tirages, c’est un dernier dixième de secondes pour enfin discerner les couleurs, et les mélanger.

